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Inlandsis

Orchestre

Camille PÉPIN

Details

Instrumentale Familie Orchester
Katalogklassifizierungen Orchestermusik
Nomenklatur Instrument 3.3.3.3 - 4.3.3.1 - timb, 3 perc, hp, pno et cordes (12.14.10.8.6)
Herausgeber Éditions Billaudot
Cotage GB10533
Zyklus / Stufe Konzert
Jahr copyright 2023
  • Inlandsis Visuell

Beschreibung

Inlandsis est une fresque glacée pour orchestre inspirée par la fonte préoccupante des glaces sur Terre. Ce mot scandinave signifiant « glace des terres intérieures » désigne les immenses glaciers qui se présentent sous la forme de vastes étendues immaculées pouvant atteindre des milliers de mètres d’épaisseur. Ils se prolongent sur la surface de la mer, formant ainsi des barrières de glace. À cause du réchauffement climatique, ces dernières s’avancent inexorablement vers la mer et sont déjà disloquées aux deux tiers en Antarctique ; le dernier tiers présentant déjà d’inquiétants signes de désagrégation. Cette avancée créée de grandes rivières d’eau glacée qui s’écoulent des terres vers les océans, contribuant ainsi à l’accélération des fontes des glaces et à et la hausse des niveaux de la mer.

 La pièce s’ouvre par un appel alarmant de quatre notes aux cors pavillons en l’air, bois & cloches sur un aplat massif et froid. Liquides et purs, les cordes & le piano s’en écoulent jusqu’à se refondre dans la masse sonore. Un motif-impact de timbales inquiétant et pesant annonce la dislocation des blocs gelés. De l’aplat transparent des cordes qui en résulte émerge une gamme descendante d’abord lente et mystérieuse, soutenue par les bois et irisée par les percussions avec archet (vibraphone & crotales). Elle préfigure l’écoulement des eaux glacées vers la mer. Un chant de cor nostalgique est colorisé par de douces perturbations à la clarinette, nous faisant déjà penser à une matière qui se désagrège. Toujours plus glissante et vertigineuse, la gamme liquide revient chaque fois en accélérant. Elle chute inévitablement et se fracasse dans le grave de l’orchestre.

Le paysage sonore d’Inlandsis est posé. Il nous alerte sur la nécessité de maîtriser le ralentissement du réchauffement climatique.

Cette matière se réchauffe en contaminant progressivement les vents et amène un second épisode plus lumineux et rythmique. Les motifs du piano & des cordes sont teintés d’éclats iridescents aux crotales & claviers (harpe, piano, vibraphone, glockenspiel). Un chant confié aux timbres chauds et graves de l’orchestre en émerge, glissants et sensuels (contrebasses, violoncelles & tuba, dans lesquels se fondent des roulements de timbales). Il se répand chez les cordes & bois aigus pour rejoindre les touches de lumières glacées et scintillantes des claviers. C’est sur cette matière lumineuse et enlevée que sont finalement entonnées les quatre notes fondatrices de l’ouvrage (appel de cors du début de l’œuvre). Si elles présentent une lueur d’espoir, le matériau s’assombrit pourtant puis se désagrège.

Dans la partie centrale, la clarinette reprend la mélopée mélancolique du cor du premier épisode. Tout le pupitre de cors lui fera écho. La flûte vient aussi la texturiser en la perturbant rythmiquement, comme si la matière commençait à se craqueler. La sonorité sombre des cors bouchés & le glas des cloches-plaques se mêlent pour égrener la gamme descendante présentée plus tôt dans l’œuvre, toutefois illuminée par la harpe & crotales avec archet. Avec leurs harmoniques glissantes, les violons ponctuent ce chant d’une brume froide et mystérieuse. Toutes ces sonorités contradictoires créent une texture fragile et hésitante : faut-il espérer ?

 Soudain, l’épisode pulsé réapparaît. Les bois s’écoulent avec urgence. Les vents graves & timbales fonctionnent en un seul bloc. Ils ponctuent le discours de leurs impacts, se détachant ainsi de la matière sonore globale. L’appel initial des cors est étendu aux cuivres et laisse place à strate répétitive, liquide et emportée. De plus en plus lyriques, les cors & cordes réchauffent la texture. Ils nous emmènent vers une atmosphère rêveuse s’emplissant progressivement d’espoir. Le chant grave et chaud du second épisode est repris et cette fois étendu aux trombones, formant un bloc majestueux. Les bois sont luxuriants et lumineux. Les notes fondatrices de l’ouvrage inondent ce tutti solaire et l’espoir se répand dans toutes les strates de l’orchestre.

La texture semble s’apaiser, mais un roulement de timbales amorce le retour du paysage alarmant initial. Tous les éléments de l’œuvre sont rappelés avant de se fondre totalement dans la brume glissante et mystérieuse des cordes. La matière glacée s’est évaporée.

Cette pièce repose sur l’ambivalence de deux émotions : la peur d’une fin inéluctable et l’espoir d’un nouvel horizon. Si l’on est pessimiste et souvent impuissant face aux évènements liés aux dérèglements climatiques, nous ressentons toujours cette grande émotion devant la beauté et la force de la nature.

Nous aurons toujours la volonté de la préserver et l’espoir que, dans sa puissance, elle puisse trouver une solution.


(Camille Pépin)