Le Sommeil a pris ton empreinte
Concerto pour violon et orchestre
Détails
Famille instrumentale | Violon, Orchestre |
Classifications catalogue | Violon et orchestre ou ensemble |
Nomenclature instrument | Violon solo et orchestre (2.2.2.2 - 4.3.3.1 - timb, 2 perc, hp, cel et cordes) |
Durée totale | 00:22:00 |
Éditeur | Éditions Billaudot |
Direction de collection | CAPUÇON Renaud |
Cotage | GB10475 |
Style musical | Contemporain |
Année copyright | 2023 |
Année copyright | 2023 |
Description
Le Sommeil a pris ton empreinte est un concerto pour violon et orchestre dédié à Renaud Capuçon. Ayant toujours à coeur de faire du « sur mesure » pour mes interprètes, j’ai naturellement demandé à Renaud s’il souhaitait une inspiration particulière. Lorsqu’il a proposé Éluard, j’ai été immédiatement séduite par l’idée. C’est ainsi que je choisis trois poèmes qui allaient structurer le concerto en cinq moments.
1. Le sommeil a pris ton empreinte
Et la colore de tes yeux I.
Ce court poème reviendra trois fois. Telle une ritournelle à l’atmosphère vaporeuse, il encadre deux épisodes plus conséquents. Instant suspendu dans le temps, son matériau musical sobre est exploité dans les autres mouvements : un motif mélodique aux contours modaux (le sommeil), une quinte ascendante (l’amour), un arpège (une palpitation). Il marque de son empreinte l’oeuvre entière - lui donnant ainsi son titre. Sa couleur sonore est chaque fois variée puisque le poème prend un sens différent selon ce qui le précède ou le suit.
Lors de sa première exposition, le chant amoureux du violon est nimbé de trémolos en harmoniques, embrumé pendant ces heures ensommeillées. Les vents lui répondent en une texture plus sombre. Un arpège au rythme instable s’immisce dans la partie soliste, telle une palpitation inquiétante présageant le drame à venir.
2. Le Temps déborde
Le second mouvement contraste avec l’atmosphère précédente. En novembre 1946, l’épouse du poète, Nusch, meurt soudainement. Ce basculement de son univers se traduit par l’arrivée abrupte d’un flux agité nous plongeant inéluctablement dans les méandres d’un esprit tourmenté. Le violon dialogue avec l’orchestre dans un esprit de confrontation : celle du poète face à la perte de l’être aimé. Lors d’un bref moment seulement, les tensions s’apaisent : le poète se rappelle Nusch. Dans la cadence qui suit, il est confronté à lui-même, ébranlé.
3. Le sommeil a pris ton empreinte
Et la colore de tes yeux II.
C’est par un paysage sonore désolé que commence le troisième mouvement. Il est créé par un creux entre les instruments aigus et graves de l’orchestre.
Quelques touches de lumière viennent emplir ce vide de leur magie : harpe, célesta, gongs lointains et l’arpège brumeux déployé au violon. La partie soliste reprend ensuite le motif du sommeil. Les cors lui font écho sur la quinte ascendante figurant l’amour, dans l’espoir d’un nouvel horizon.
4. Le Phénix
Le violon, lyrique sur des nappes de cordes, est d’abord nostalgique. Une montée orchestrale vers de doux aigus amène un épisode pulsé optimiste. Il laisse place à une cadence au souffle ininterrompu dont l’horizon s’éclaircit peu à peu.
Après son deuil, Éluard rencontre Dominique et renaît en effet de ses cendres. L’épisode pulsé revient, presque euphorique. Il rappellera tous les éléments entendus dans l’oeuvre pour s’embraser en un tutti d’orchestre célébrant la renaissance du poète par l’amour. Puis, le violon nous ramène progressivement à l’atmosphère vaporeuse initiale.
5. Le sommeil a pris ton empreinte
Et la colore de tes yeux III.
Grâce au ronronnement rassurant des cordes graves de l’orchestre, la texture est douce et enveloppante. Le lumineux violon dans l’aigu énonce une dernière fois le motif du sommeil, en écho au hautbois. Une dernière palpitation. Le violon s’éteint. Apaisé.
Dans cette pièce, les alliages des vents (cors, clarinettes, flûtes) créent un jeu de résonances par morphing. Cloches (tubulaires, gongs, notes graves du célesta) et métaux (tams, cymbales) amplifient ces résonances. Les strates des claviers (célesta, harpe, vibraphone) parfois déphasées créent une nappe vibrante au caractère magique et rêveur. Les sons purs des harmoniques de cordes s'y mêlent volontiers. Cette orchestration contribue à l’élaboration de
mixtures ensommeillées.
Le violon soliste en émerge, s’y fond parfois, ou encore se déploie au-dessus d’elles, chantant et amoureux.
(Camille Pépin)